Franck Ngonga

Les trois raisons qui poussent les Congolais à suivre France-Belgique ce soir

Ce mardi 10 juillet à 19h, la planète football va vibrer autour de la rencontre entre la France et la Belgique, comptant pour la demi-finale de la Coupe du monde 2018. Les bleus disputent une place en finale de la Coupe du monde en Russie face aux diables rouges. Le duel s’annonce très serré au vu des parcours des deux sélections, et le suspense reste encore intact. Au Congo Kinshasa, les fans attendent aussi de près la rencontre et beaucoup supportent les diables rouges belges.  

Bien que toutes les équipes africaines soient déjà éliminées de la coupe du monde, la rencontre France-Belgique suscite encore un engouement pour les congolais de Kinshasa (capital de la République Démocratique du Congo). D’aucun estiment d’ailleurs que cette rencontre se joue entre deux sélections africaines qui se seraient retrouvées par hasard sur le continent européen.

France contre Belgique, vous voulez plutôt dire Matonge VS Château-Rouge

Pour les gens ici, c’est très clair, ce France-Belgique est un match RDC vs Congo Brazza ou plutôt ‘Matonge VS Château rouge’. C’est le passé colonial de la RDC (colonie belge) et du Congo Brazzaville (colonie française) qui poussent certains Kinois à faire ce parallélisme. Par ailleurs, la Belgique est la France sont aussi proches géographiquement que Kinshasa et Brazzaville, les deux capitales les plus rapprochées d’Afrique. Mais après tout, et comme le disait un grand-père d’un ami :

« tant que j’entends parler de Mandanda, Nzonzi, Lukaku, Boyate et autres, l’Afrique est très bel et bien représentée dans cette compétition ».

Voici les trois raisons expliquant l’attachement des congolais à cette demi-finale :

Sept Français et Belges d’origine congolaise vont probablement jouer ce soir

La rencontre de ce soir va opposer deux nations européennes. Mais ici à Kinshasa, les origines congolaises de certaines des joueurs de ces deux sélections sont une source de motivation pour bon nombre de fans du ballon rond.  Tenez : ils seront au nombre de sept, sept Français et Belges qui ont quelques choses à voir avec la RDC et pourront être alignés ce soir.

Du coté des bleus, ils ne sont que trois : Steve Mandanda– dont le frère cadet défend les couleurs de Léopards de la RDC, Presnel Kimpembe– qui a déjà enfilé le maillot de Léopards avec la sélection de moins de 21 ans, Steven N’Zonzi – dont le père est d’origine congolaise, très longtemps courtisé par le sélectionneur de l’équipe nationale de la RDC, Florent Ibenge.

De l’autre côté, la Belgique a un fort contingent des joueurs d’origine congolaise. Michy Batshuayi, un belge qui possède également la nationalité congolaise. En 2015, il a été convoité par Florent Ibenge pour rejoindre la sélection congolaise, mais sans succès. Vincent Kompany, défenseur central Belge, d’origine congolaise par son père, Pierre KompagnyDedryck Boyata, défenseur Belge qui a également des origines congolaises. Romelu Lukaku, attaquant Belge, dont le père est congolais. Très adulé par le public congolais pour sa technicité et son aisance face au but, Lukaku reste le chouchou d’une partie de Kinshasa.

Si vous voulez choisir votre fond d’écran, c’est ici :

ROJOLU, un club de football au cœur de Kinshasa

Les cœurs de certains Kinois battent plutôt pour la Belgique. Et pour cause, la présence d’un club de football dans l’une des communes de la ville de Kinshasa : ROJOLU. Le nom de ce club porte les initiaux de Lukaku : Ro pour Romelu, Jo pour Jordan, LU pour Lukaku, tous deux footballeurs professionnels en Europe. Le SC ROJOLU a été créé par le père Lukaka, Roger Lukaku, pour promouvoir la culture du football dans sa commune d’origine.

Comme le disait Julia Ndjaliba, tante de Romelu Lukaku à TV5 monde, « Chaque fois qu’il marque un but, je suis envahie par les habitants du quartier ». Ils me demandent de leur acheter la bière en l’honneur de Romelu. Même quand je n’ai rien, je suis obligé de leur trouver ce qu’ils demandent. »

Le congolais plus proches de leur puissance coloniale que de la France

Ce matin j’ai surpris des fans du football en pleine discussion autour du match d’aujourd’hui. Six contre un étaient pour la Belgique. Et quand je leur pose la question pour en savoir plus sur leur choix, ils me répondent fièrement : « Nous soutenons nos cousins belges. Quand ils étaient venus pour nous coloniser, nous les prenions comme nos oncles. Maintenant on est cousin. Et rien que pour ça, nous ne pouvons être derrière la France », me dit l’un d’eux.

De toutes les façons, France-Belgique de ce soir sera l’un des matchs les plus suivis de l’Afrique en général et de Kinshasa en particulier lors de ce mondial. Que le meilleur gagne!

Franck Ngonga


En RDC, un an déjà que le Rassemblement de l’opposition peine à mobiliser

Le 19 septembre dernier, le Rassemblement de l’opposition a organisé une messe en mémoire des personnes tuées lors des manifestations les 19, 20 et 21 septembre 2016 à Kinshasa (RDC). Plusieurs cadres de cette plateforme ont pris part à cette messe afin de « recommander les âmes de disparus à Dieu ». Un an après, l’opposition peine à réussir des grandes actions de rue. Toutes ses tentatives sont bloquées par le pouvoir en place. Retour sur quelques rendez-vous manqués.

Nous sommes le 19 septembre 2016. A Kinshasa, capitale de la République Démocratique du Congo (RDC), on s’acheminait petit à petit vers la fin du deuxième et dernier mandat constitutionnel de Joseph Kabila. A trois mois de la date butoir du 19 décembre, le Rassemblement de l’opposition, avec à sa tête Étienne Tshisekedi, a appelé à une manifestation monstre pour exiger la tenue des élections et ainsi infliger un premier carton jaune à Joseph Kabila, avant un autre en novembre, puis un carton rouge en décembre 2016.

Les sympathisants de cette frange de l’opposition ont bravé la peur et sont sortis manifester. Bilan : plusieurs morts (32 selon la police, une cinquantaine selon des ONG), beaucoup de blessés et d’important dégâts matériels. Certains cadres de l’opposition sont en même temps interpellés. Kinshasa a vraiment retenu son souffle en ce jour. Depuis, l’opposition peine à rassembler pour les manifestations de rue. Un an jour pour jour après ces manifestations, le Rassemblement de l’opposition (Rassop) appelle à des mobilisations populaires, des meetings publics ou des manifestations de rue, mais sans parvenir à rééditer l’exploit du 19 septembre 2016.

A chaque fois que le Rassemblement invite la population à manifester pacifiquement, la police et les forces de sécurité sont déployées en masse, des camions antiémeute et des jeeps des service de l’ordre patrouillent la ville, placés dans certains coins de Kinshasa. Finalement, les manifestations transforment Kinshasa en ville morte. Entre la volonté de réclamer son droit et la peur de se faire arrêter par la police, les Kinois ont opté pour la deuxième option : rester à la maison à l’abri de botte de la police, des gaz lacrymogènes et du crépitement des armes.

Du vivant d’Étienne Tshisekedi, le Rassemblement avait déjà du mal à mobiliser

Le 19 septembre 2016 était la dernière démonstration de force du Rassop à Kinshasa. Qui pouvait croire que même les appels du « sphinx de Limite » ne pouvaient pas aussi tant mobiliser ? Pourtant, le 19 novembre 2016, Tshisekedi avait rendez-vous avec les siens au boulevard triomphal de Kinshasa pour un meeting populaire. La manifestation n’a pas eu lieu. Le domicile du « Leader maximo », comme l’appelaient affectueusement certains de ses proches, était totalement encerclé par la police. Le siège de l’Union pour le démocratie et le progrès social, son parti, aussi.

L’espace Triomphal, lieu où devrait se tenir le meeting, a été transformé en un stade. De 6h du matin à 18h, des footballeuses se sont livrées infatigablement à un long et interminable match de football. Malgré cet étouffement du meeting de l’opposition, Kinshasa a tourné au ralenti en ce 19 novembre 2016. Une militarisation de la ville qui n’a pas permis au Rassop de se déployer. Pour une fois, Tshisekedi père ne pouvait rien faire.

Le 19 décembre 2016, jour de l’exhibition du carton rouge à Joseph Kabila, rien ne s’est également passé. Tshisekedi avait appelé les congolais à rester mobilisés pour exiger l’alternance à la tête du pays. Finalement le carton rouge n’a pas été exhibé, le meeting n’a pas eu lieu.

Pour cause les négociations menées par les évêques de la Conférence épiscopale nationale du Congo. Sous leur direction, le pouvoir et l’opposition ont signé le 31 décembre 2016 l’Accord de la Saint Sylvestre, qui prévoit une transition politique et des élections en fin 2017. » Tout était calme, comme l’avait dit Justin Bitakwira, actuel ministre de développement rural en RDC : « Le 19 décembre, il y aura le phénomène Trump. Certains prédisent le chaos mais il n’y aura rien du tout », avait-il avancé au micro d’Actualite.cd.

 Le père meurt, le fils le remplace mais le Rassemblement peine toujours à mobiliser

Rassemblement, RDC
Félix Tshisekedi, président du Rassemblement ©Stanys Bujakera ACTUALITE.CD

Après la mort d’Etienne Tshisekedi, son fils, Félix Tshisekedi, prend la tête du Rassemblement de l’opposition. Il est radical comme son père. Dès sa nomination le 3 mars dernier, il promet de continuer la lutte et d’œuvrer en vue de l’alternance en RDC.

Après l’échec des discussions sur l’arrangement particulier qui devrait établir les modalités pratiques pour la mise en oeuvre de l’accord du 31 décembre, le Rassop avait appelé à une marche pacifique pour manifester leur mécontentement. La date était déterminée : lundi 10 avril 2017. Pour son premier baptême de feu, le Rassop orphelin d’Etienne Tshisekedi n’a pas réussi son pari. Comme d’habitude, le pouvoir a tout interdit. Les forces de l’ordre et sécurité patrouillent la ville de Kinshasa. Tout était calme : boutiques, marchés, transports en commun quasiment fermés. L’opposition n’a pas marché, Kinshasa a tourné à la ville morte. Interrogé à propos de cet échec, Martin Fayulu, cadre du Rassop, nous a avoué qu’ils avaient changé de stratégie en optant pour des marches parcellaires afin « de ne pas livrer la population au carnassier ». Là encore, le rendez-vous est manqué.

Le dernier échec dans la mobilisation date d’il n’y a pas longtemps. Le 8 septembre dernier, le Rassemblement a encore une fois de plus donné un rendez-vous à ses sympathisants pour un meeting populaire.  Pour la unième fois le pouvoir a tout interdit. Même lors de son retour à Kinshasa, Félix Tshisekedi ne s’est pas offert un bain de foule comme il le souhaitait. Il a été escorté par la police de l’aéroport de Ndjili jusqu’à sa résidence.

Voilà une année jour pour jour que le Rassemblement de l’opposition peine à réussir ses manifestations de rue. Doivent-ils changer de stratégie ? Le peuple en a-t-il assez des opposants ? Le pouvoir a-t-il peur de la capacité de mobilisation du Rassop ? Les questions politiques agacent-elles les congolais ? Autant de questions qui restent jusqu’à présent sans réponse.

Franck Ngonga


Réseaux sociaux en RDC : quand l’Etat bloque, les internautes débloquent

Le 7 août dernier au soir, l’accès aux réseaux sociaux a été perturbé en RDC. L’Etat congolais avait ordonné aux réseaux des télécommunications de restreindre l’octroi des données internet pour éviter les échanges entre internautes. Finalement, le 11 août que tout est revenu à la normale. Comment les Kinois font-ils face à cette restriction de liberté ? Ils recourent au Réseau Virtuel Privé (VPN).

Lundi 7 août 2017, la ville de Kinshasa a été secouée par des attaques de membres présumés du mouvement politico-religieux Bundu dia Mayala tenu par l’acteur politique Ne Muanda Nsémi, récemment évadé de la prison de Makala. Avec des bandes rouges autour de leurs têtes, ces personnes réclamaient le départ de l’actuel président de la RDC, Joseph Kabila.

Mais leur marche dans différentes parties de la capitale congolaise a tournée court. Les sympathisants du mouvement Bundu dia Mayala ont dû faire face aux forces de l’ordre et ce fut le début de la confrontation. Bilan des affrontements : 19 morts et quelques blessés, selon les sources policières congolaises, au moins 27 morts selon l’ONG Human Right Watch.

A la suite de ces affrontements, des images de personnes gisant dans le sang, celle d’un policier abattu et d’autres images des violences se sont mises à tourner en boucle sur les réseaux sociaux. Twitter, Facebook, Whatsapp, Instagram … ont été inondés de messages pour la plupart hostiles au pouvoir en place. Tous ces événements se sont passés au lendemain de deux journées « ville morte » décrétées par le Rassemblement de l’opposition.

Pour « prévenir ou limiter le dérapage », le gouvernement a intimé l’ordre aux opérateurs de télécommunications de restreindre le partage d’images en RDC. Le communiqué de l’Autorité de Régulation de la Poste et des télécommunications (ARPTC) est publié vers 21 heures de Kinshasa.

« En vue de prévenir les échanges abusifs des images via les réseaux sociaux entre abonnés de votre réseau, je vous prie de prendre, dès réception de la présente, les mesures techniques préventives susceptibles de réduire au strict minimum la capacité de transmission d’image » lit-on dans le communiqué signé par le directeur de cet organe.

Les internautes débloquent

Bien avant la publication du communiqué, des personnes prévenaient déjà sur la possibilité de coupure de réseaux sociaux. Les posts des uns et des autres autour de 19 heures en disent déjà long.

« Allo ! VPN tu es où ? » peut-on lire sur le post d’un utilisateur de Facebook. « Faites attention, téléchargez d’ores et déjà le VPN,  car on risque de couper la connexion», écrit un autre. C’est comme s’ils étaient déjà informés.

Presentation de l’équipe ACTUALITE.CD en 2016 ©ACTUALITE.CD

Même dans la salle de rédaction d’ACTUALITE.CD, un média congolais en ligne, tout semble connu d’avance. « Il faut télécharger VPN, ce n’est pas une blague », dit le directeur de publication à ses collègues journalistes.

Quand l’Etat congolais s’active à bloquer ou à restreindre l’usage de réseaux sociaux, les internautes, eux, s’affairent à se transmettre des messages pour contourner les mesures. Cette fois-ci ils ont bien eu l’Etat congolais, du moins pour les plus branchés d’entre eux, d’autant plus que ce n’est pas la première fois que l’usage des réseaux sociaux est restreint en RDC.

Janvier 2015 et décembre 2016, l’accès aux réseaux sociaux avait déjà été bloqué en RDC

Ce n’est pas la première fois que l’Etat congolais a recourt à cette méthode, l’argument pour restreindre la communication sur ces outils : risque de trouble à l’ordre public. Quasiment plus d’accès à Facebook, Twitter, Whatsapp, instagram et aux autres réseaux… Déjà autour des élections, en janvier 2015, il y avait eu une restriction pour les internautes. Un projet de révision de la loi électorale avait provoqué des manifestations à Kinshasa d’une ampleur inattendue, les réseaux sociaux  ont été coupés pendant plusieurs semaines.
En décembre 2016, cette restriction a eu lieu à nouveau, à quelques jours du 19 décembre 2016, date de la fin du deuxième et dernier mandat constitutionnel de Joseph Kabila. L’Etat congolais avait surpris les utilisateurs des réseaux sociaux, mais les plus malins d’entre eux avaient réussi à téléchargé VPN pour continuer à naviguer facilement. Depuis, beaucoup l’ont appris à leurs dépens : quand il y a tentative de blocage, ils recourent aux méthodes de déblocage.

L’Etat bloque, les internautes débloquent, et la vie continue. Ca se passe nul part ailleurs qu’en RDC.

Franck Ngonga

 


RDC : ces kinois qui en ont assez de l’action ville-morte

Le Rassemblement de l’opposition, plateforme opposée au pouvoir de Joseph Kabila, a appelé à deux journées ville-morte le mardi 8 août dernier et le mercredi 9 août sur toute l’étendue de la RDC. Ceci pour obtenir d’ici la fin du mois de septembre la publication du calendrier électoral de la part de la Commission Électorale Nationale Indépendante. Cette plateforme dirigée par Félix Tshisekedi et dont Moise Katumbi est membre, ne jure que par la tenue de la présidentielle à la fin de cette année. Mais comment les Kinois perçoivent-ils ces journées villes ?

Entre l’envie de survivre et la peur de sortir, les avis sont partagés

Mardi 8 août 2017, Kinshasa se réveille dans une paralysie de toutes activités économico-sociales. Tout tourne au ralenti dans la capitale congolaise. Les transports en commun sont rares, les boutiques, magasins, pharmacie, marchés sont restés fermés presque toute la journée. Kinshasa, ville habituée aux bruits et aux embouteillages sur ses grandes avenues a changé de visage. Les quelques rares Kinois (habitants de Kinshasa) qui voulaient se rendre sur leurs lieu de service n’ont pas trouvé de moyen pour. Et certains n’hésitent pas à afficher leur mécontentement.

Image du trafic routier à Kinshasa le 7 août 2017 © Franc Ngonga

Olivier Kanda, la trentaine, n’en revient pas. Au regard de la situation économique de l’heure, il conteste l’appel à deux jours de villes mortes décrété par le Rassemblement. Avec son sac à main, il attend avec impatience le transport en commun qui n’arrivera finalement pas…

« Nous vivons au taux du jour. Actuellement la situation économique du pays est catastrophique. Rester deux jours à la maiso, c’est faire souffrir nos enfants pour rien. Le Rassemblement devrait changer de stratégie en tout cas, sinon ça ne va pas», a-t-il déclaré en attente d’un bus à Kitambo Magasin, un des coins chaud de Kinshasa.

Un peu plus loin se trouve Henri, une vingtaine d’année. Tout comme Olivier, il critique les actions du Rassemblement de l’opposition. D’après lui, la politique de la ville morte ne marche pas du tout.

« Du vivant d’Etienne Tshisekedi, nous avons fait des villes mortes et ça n’a rien apporté. Aujourd’hui nous repartons de plus belle avec cette stratégie ? Je pense que ça ne profite pas au peuple congolais habitué à vivre au taux du jour. On devrait arrêter avec ça », dit-il.

Si Olivier et Alain plaident pour le changement de stratégie de la part du Rassemblement compte tenu de la situation économique critique, d’autres Kinois ne voient pas les choses sous cet œil. Ils encouragent plutôt les actions de cette plateforme, notamment les journées ville-morte.

Nous sommes à Limete (l’une de commune de la ville de Kinshasa) fief historique de l’opposition congolaise. Ici, beaucoup de personnes rencontrées soutiennent mordicus ces actions.

« C’est une façon de faire pression pour réclamer les élections. S l’on ne sait pas se sacrifier, comment sauront nous libérer notre pays ? Nous devons faire plus que ça. Déjà aujourd’hui tout nous a réussi, et j’espère que demain sera pareil », argue Patient Mutomb.

A Ngamba (une de 24 communes de Kinshasa), nous retrouvons Irène Kalila, qui invite les rares commerçants ayant ouvert leurs boutiques à fermer.

« C’est la ville morte ce mardi, vous n’êtes pas au courant ? La mobilisation doit continuer encore demain, nous devons aller de l’avant mes frères et sœurs. Mercredi on ouvre pas non plus », les invite-t-elle.

Mercredi 9 août, la mobilisation baisse d’un cran

Si le mardi 8 août Kinshasa a vraiment ressemblé à une ville-morte, le mercredi 9 août ce n’était pas le cas. Les activités économiques et sociales reprennent, bien que timidement. Les transports en commun étaient assez perceptible sur les grandes avenues de la capitale. La vie a repris petit à petit. Les Kinois en ont-t-ils assez de cette stratégie ?
C’est en tout cas ce qu’affirment certains d’entre eux qui se sont levés tôt ce matin pour se rendre à leurs services respectifs.

Reprises timide de trafic à Kinshasa ce 9 août 2017 © Franck Ngonga

« Trop c’est trop, nos politiciens semblent nous rouler dans la boue. Deux jours de ville morte et on mangera quoi ? Du sable ? Non moi je sors », nous dit l’un d’entre eux.

« Bien sûr que nous avons envie du changement, mais ça ne viendra pas comme ça, lorsque l’on sait déjà que cette stratégie n’avait rien apporté du vivant de papa Etienne Tshisekedi », ajoute un autre.

Visiblement, certains kinois en ont assez de cette action ville-morte. Ils veulent survivre au jour le jour. Le 8 août dernier, paralysie totale des activités dans la capitale congolaise. Mercredi 9 août, les activités commerciales reprennent timidement dans la matinée, les transports en communs circulent de nouveau. Entre temps certains kinois se plaignaient de cette stratégie du Rassemblement.

Franck Ngonga


RDC et réseaux sociaux: quand les politiciens se règlent les comptes sur twitter

Ils ne se rencontrent pas physiquement mais ils se règlent si facilement les comptes. Depuis un certain moment, de plus en plus des hommes politiques congolais sont actifs sur twitter, l’un des réseaux sociaux aux contraintes éditoriales difficiles: au plus 144 caractères.  Ils s’y sont plutôt adaptés très vite.

Publier des opinions, commenter l’actualité, alimenter les discussions avec leurs abonnements, mobiliser pour des manifestations pacifiques sont autant d’activités les plus usitées sur les comptes twitters de nos politiques.  Mais pas seulement.  Twitter est devenu pour les politiciens congolais un lieu par excellence de règlement de comptes. Si Donald Trump sait facilement s’attaquer à l’ »Obama Caire » et aux journalistes américains via ce réseau social depuis les USA, les politiques congolais aussi ne sont pas en reste.

L’homme d’affaire Sidika Dokolo-qui s’invite peu à peu dans la politique ; le président de la Commission électoral national indépendante (CENI), Corneille Nangaa ; Moise Katumbi, devenu l’un des opposants farouches au président de la RDC, Joseph Kabila ; Martin Fayulu et Felix Tshisekedi du Rassemblement de l’opposition, une plateforme opposée au pouvoir en place, Julien Paluku, gouverneur du Nord-Kivu, Vital Kamerhe de l’Union pour la nation congolaise (UNC)-un parti politique de l’opposition en RDC ; Eve Bazaiba également de l’opposition pour ne citer que cela, ne laissent aucune critique contre leurs actions passer inaperçues.   Ils trouvent dans twitter un moyen aisé, rapide, et direct de répondre aux attaques et de mobiliser leurs bases.

Nangaa répond à la Monusco sur twitter

L’annonce du report des élections prévue selon l’accord du 31 décembre en fin 2017  avait provoqué une onde de choc au sein de la classe politique congolaise. Différents leaders de l’opposition avait réagi négativement à cette annonce de la Ceni, à travers son président Corneille Nangaa. La Monusco aussi avait haussé le ton. Maman Sidikou, chef de la mission Onusienne en RDC avait appelé la Ceni à publier « sans tarder » le calendrier électoral et consensuel en vue de la tenue des élections.

Là, la réponse de Nangaa ne s’est fait pas attendre. Si Sidikou avait utilisé le communiqué de presse pour faire part de ses réclamations, le président de la CENI, lui s’est servi de son compte twitter pour répondre. D’un ton sec, il déclare : « La Monusco n’a pas mission d’organiser les élections mais plutôt le maintien de la paix en RDC. Que chacun s’atèle à sa tâche».

Et le tweet a fait le tour du réseau : 190 mentions like, 88 retweets, et 109 interactions. Plutôt un record pour un Corneille Nangaa habitué à nager dans les 3 à 5 retweets pour ses publications.

Muyambo et Kamehe aussi

Cet épisode n’est pas le seul à avoir enflammé la « twitosphère » congolaise. Pas plus tard qu’hier, une autre polémique a éclaté et fait le tour de twitter en RDC. Cette fois-ci c’est une personne derrière le barreau qui l’alimente : l’ex bâtonnier Jean-Claude Muyambo, opposant farouche au gouvernement en place. A la base de sa réaction, l’envie de Vital Kamerhe de soutenir les actions du Rassemblement, plateforme opposée à Kabila.

Depuis un certain temps, Vital Kamerhe, un des opposants congolais, président UNC, prend ses distances avec le gouvernement de « transition » issu du dialogue de tenue en 2016 sous la médiation des évêques catholiques de la Conférence épiscopale nationale du congo (Cenco).  Kamerhe veut rejoindre de nouveau le Rassemblement de l’opposition. Mais Muyambo ne l’attend pas de cette oreille. De la prison de Makala où il se trouve, il a haussé le ton : « si Kamehre réintègre le Rassemblement, moi je quitte ».

Twitter : un lieu de mobilisation pour des appels à manifestation

Ce réseau social n’est pas seulement utilisé pour se régler les comptes. Mais c’est aussi un lieu de mobilisation pour des appels à manifestation populaire. Simple et peu coûteux, twitter est devenu un de canaux les plus prisés de politiciens congolais.

Le 31 juillet dernier, des mouvements citoyens de la jeunesse avaient appelé à une journée de marche sur toute l’étendue de la RDC pour réclamer la publication du calendrier électoral. Cet appel à manifester a été relayé par les leaders de l’opposition congolaise principalement sur twitter.

La mobilisation anti-pouvoir se fait de plus en plus sur les réseaux sociaux. Les politiciens congolais de la Majorité au pouvoir et de l’opposition s’y donnent rendez-vous tous les jours. Une chose est sûre : avec les manifestations qui se profilent à l’horizon, twitter sera toujours et davantage sollicité.

Franck Ngonga